À la découverte de Sant Martí Vell, le village espagnol qui a ravi le cœur d’Elsa Peretti, joaillière emblématique de Tiffany & Co.

À la fin des années 60, Elsa Peretti était tombé sous le charme du petit village catalan de Sant Martí Vell. À l’occasion du cinquantième anniversaire de leur collaboration, Tiffany & Co. invitait à découvrir les trésors cachés de la révolutionnaire joaillière…

Elle y avait trouvé son havre de paix. Son petit paradis sur terre, loin de la vie au rythme effréné de New York et au plus près de la nature qui l’inspirait tant. En 1968, à l’âge de 27 ans, Elsa Peretti achète sa première maison à Sant Martí Vell, à une centaine de kilomètres au Nord-Est de Barcelone. En peu de temps, la créatrice d’origine italienne s’est épris de cette minuscule bourgade qui compte aujourd’hui un peu moins de 250 habitants. Suite à l’acquisition de la bâtisse nommée Casa Pequeña, elle deviendra propriétaire de 27 autres maisons et fermes au sein du village médiéval. Commence alors un manège d’allers-retours entre la péninsule ibérique et New York. Cette jungle urbaine qui a vu naître sa légende.

La fin des années 60 correspond également à son déménagement dans la ville qui ne dort jamais. La jeune femme a alors l’ambition d’y poursuivre sa carrière de mannequin, entamée quelques années plus tôt. Très vite, elle devient l’une des muses et mannequins favorites du couturier américain Halston aux côtés de Pat Cleveland, Anjelica Huston et Pat Ast, entre autres. Halston ne jure que par la Florentine, son style le fascine et très vite, il lui confie la tâche d’imaginer les accessoires et les bijoux pour sa maison. Mais, c’est surtout sa collaboration avec Tiffany & Co., entamée en 1974, qui a définitivement installé Elsa Peretti au panthéon du bijou. Chez le joaillier américain, elle va réintroduire le travail de l’argent et y insuffler son style organique, tout en volumes, et révolutionnaire. De la célèbre manchette Bone au pendentif Open Heart, ces pièces aux aspects de sculptures miniatures à porter rencontrent un succès sans précédent. Son entourage se compose de figures marquantes de la pop culture telles que Andy Warhol, Bianca Jagger, Cher et Liza Minnelli. Et la joyeuse bande passe une grande partie de son temps au sein des murs vibrants du mythique club Studio 54.

Un tumulte dont Elsa Peretti n’hésite jamais à s’échapper pour se ressourcer à Sant Martí Vell. “Je vais en Espagne pour penser, et à New York pour agir”, racontait-t-elle dans une interview en 1974. Durant les eighties, elle s’installe de manière permanente dans son village adoré. Selon les saisons et ses humeurs, Elsa Peretti y vit alternativement dans trois maisons : Can Noves, Casa Caballo et Casa Pequeña. C’est cette dernière qui avait sa préférence. Là, se trouve son bureau où ses tableaux d’inspirations, remplis d’images et de papiers épinglés, ont été laissés intacts tout comme les épreuves d’un catalogue Tiffany & Co. sur lequel elle travaillait avant sa disparition en mars 2021. Sur les murs de la maison s’affichent des œuvres de ces amis artistes à l’instar du Catalan Xavier Corbero.

L’ensemble de ces propriétés pittoresques a aujourd’hui des airs de musée à la gloire de la vie et de la carrière de la créatrice italienne. Ses designs iconiques y côtoient alors des trésors artistiques, de sculptures d’artisans japonais, à des tableaux et dessins de maîtres. De Marcel Duchamp à Picasso pour ne citer qu’eux. “Il y avait une telle générosité dans son travail, confie Stefano Palumbo, un des plus proches collaborateurs, aujourd’hui directeur de la Nando and Elsa Peretti Foundation. L’organisme, baptisé en hommage à son père Fernando, gère et administre tout l’héritage d’Elsa Peretti qui ne s’était jamais mariée et n’a pas eu d’enfant.

Elsa continue de veiller sur ce village qu’elle aimait tant. Ces cendres sont en effet conservées au sein de la chapelle de Sant Martí Vell, façonnée dans un mélange de craie et de lapis-lazuli. C’est là, dans un bleu ciel évoquant une certaine sérénité, qu’elle va résider pour l’éternité au cœur de ce petit monde qu’elle s’est construit et imaginé.